Archives Mensuelles: octobre 2006

Fondation Maeght

Fondation Marguerite et Aimé Maeght

Hommage vivant à Aimé Maeght

Le Noir est une Couleur
Révélé au XIXe siècle par les sombres visions de Goya et de Victor Hugo, justifié par les fantasmagories informes, infernales et chimériques d’Odilon Redon, retrouvé par Manet dans les ombres de Velázquez, le noir fut la paradoxale aurore du XXe siècle, alors qu’il s’annonçait comme le crépuscule du siècle précédent, symboliste et romantique.
Et puis Matisse vint et l’affirma, le théorisa précocement, et le clama comme un mot d’ordre : le noir est une couleur. Addition et soustraction à la fois de toutes les couleurs, scientifiquement considéré comme une non-couleur au même titre que le blanc, combinaison neutre de toutes les couleurs, le noir se décrit plus généralement comme l’aspect d’un corps dont la surface ne réfléchit aucune radiation visible. Descartes rappelle dans sa Dioptrique : « Il y a des corps qui, étant rencontrés par les rayons de la lumière, les amortissent et leur ôtent toute leur force, à savoir ceux qu’on nomme noirs, lesquels n’ont point d’autre couleur que les ténèbres ».

Bien que symbole de la mélancolie et du pessimisme, ce fut donc Matisse, le peintre de la joie colorée, qui dota la modernité de l’usage du noir.

Le noir structura ainsi le XXe siècle, imposa sa tonalité plus vigoureuse que triste, plus architecturale que nocturne, plus subtile que tranchante. « Le noir, comme le rouge, comme le vert, comme le bleu, comme toute autre nuance, a ses clairs, ses demi-teintes, ses ombres ; il ne fait pas, parmi les objets qui l’entourent, cette tache absolument opaque ; il s’y relie par des reflets, par des rappels, par des ruptures ; autrement il creuse un trou dans le tableau » (Théophile Gautier).

Le 6 décembre 1946, la galerie Maeght Paris ouvre une exposition « Le Noir est une couleur » constituée de 25 œuvres inédites, de Bonnard, Matisse, Braque, Rouault, Van Velde, et d’autres artistes reconnus à cette époque. Cette exposition est accompagnée de l’édition du premier numéro de « Derrière le miroir », (la revue devenue légendaire fondée par Aimé Maeght et sa maison d’édition « Pierre à feu »), clamant lui aussi, haut et fort en couverture, que le noir est une couleur.
Orné de six lithographies de Geer Van Velde, Jacques Kober y affirme : « Le noir nous donne un recul, une sorte de pauvreté. C’est une perte d’équilibre, un appel d’air. C’est le noir qui fait faire aux couleurs le grand écart. Il s’agit donc d’une lumière au-delà de la lumière, de son acclimatation et qu’elle permette un renouveau, une source (Mes Faims, c’est les bouts d’air noir, dit Rimbaud). […] Mais le noir est à la fois notion abstraite, et par là dangereuse à mesure qu’elle prend le large – et donnée concrète. Le noir concret (si j’ose dire) peut être brûlure ou caresse, éclaboussement. Sa présence met, par choc en retour, la peinture tout à construire de couleurs une synthèse de lumière et d’espace (les couleurs étant celles sur la toile et non dans le tube ».

En reprenant ce titre, « Le noir est une couleur », la Fondation Maeght à Saint-Paul rendra hommage à cette exposition et à cette revue fondatrice et se projettera dans l’avenir, du 30 juin au 05 novembre 2006.

En outre, l’heureux hasard des dates s’en mêle, ce sera l’occasion de célébrer le centenaire de la naissance d’Aimé Maeght (1906).

Geer Van Velde, Henri Matisse, Georges Braque, et Pierre Bonnard seront les témoins « présents » de l’exposition de 1946, Joan Miró et Fernand Léger offriront leurs vagues irrépressibles. Lucio Fontana, Olivier Debré, Simon Hantaï, Hans Hartung grifferont et entameront la nuit des toiles.
Ellsworth Kelly, Ad Reinhardt, Josef Albers, Aurélie Nemours, Barnett Newman architectureront le velours infini de leurs sombres pigments.
Robert Motherwell, Willem De Kooning, Kazuo Shiraga, Bram Van Velde, Raoul Ubac, Henri Michaux, Franz Kline, Jean Dubuffet, André Masson, inscriront leur geste dans la matière. Alberto Burri, Richard Serra, Jannis Kounellis, Claudio Parmiggiani, Antonio Saura, Arnulf Rainer, Gerhardt Richter, Antoni Tàpies et Pierre Soulages répandront leurs grasses et soyeuses effluves.
Alighiero Boetti, Pol Bury, Jean Tinguely, Robert Malaval, Anne et Patrick Poirier, supprimeront la pesanteur de leurs matériaux.
Bernar Venet, Christian Boltanski, Brice Marden, Allan Mc Collum, Anish Kapoor, Anselm Kiefer, brouilleront au moyen de leurs obscurités les limites entre la figure et l’informe.
Enfin, Nicolas Chardon, Pascal Pinaud, Mark Dion, Henri Foucault, Pierrette Bloch, Richard Jackson, le groupe BP, inviteront à la distance, parfois non sans humour, avec ce que Jean Dubuffet remarquait pour dire les variations du noir : « éclat, mat, luisant, poli, rugueux, fin… le noir est une abstraction ; il n’y a pas de noir, il y a des matières noires. »

Dominique Païni

Eldorado

Je viens de finir « Eldorado » de Laurent Gaudé.
C’est un livre magnifique sur l’émigration clandestine, sujet ô combien d’actualité.
La qualité de l’écriture, les portraits des candidats à l’exil et du commandant de frégate qui doit les intercepter sont poignants, subtils et justes.
Chacun y poursuit et trouvera peut être son « Eldorado »

Plutôt que de vous raconter voici un extrait :
« …- L’herbe sera grasse, dit-il, et les arbres chargés de fruits. De l’or coulera au fond des ruisseaux, et des carrières de diamants à ciel ouvert réverbéreront les rayons du soleil. Les forêts frémiront de gibier et les lacs seront poissonneux. Tout sera doux là-bas. Et la vie passera comme une caresse. L’Eldorado, commandant. Ils l’avaient au fond des yeux. Ils l’ont voulu jusqu’à ce que leur embarcation se retourne. En cela, ils ont été plus riches que vous et moi. Nous avons le fond de l’oeil sec, nous autres. Et nos vies sont lentes. »

Ce livre m’a beaucoup plu, Laurent Gaudé est l’auteur également de « le soleil des Scorta » que j’ai beaucoup aimé aussi.

Le voyage d’Hector

Je viens de lire le livre que m’a offert mon amie et dont j’avais parlé dans un post précédent.
« Le voyage d’Hector ou la recherche du bonheur » de François Lelord.

L’auteur est psychiatre, et c’est l’histoire d’un psychiatre qui décide de parcourir le monde afin de comprendre ce qu’est le bonheur. Le style est surprenant mais on se laisse vite emporter par les « leçons ».

Tout le long de son voyage, de ses rencontres, il écrit des leçons comme :
Le bonheur arrive souvent par surprise.
Le bonheur c’est d’être avec les gens qu’on aime.
Le bonheur c’est d’être utile aux autres.
Le bonheur c’est une manière de voir les choses.

Ensuite, il se sert de toutes ses expériences pour aider ses patients . Alors bien entendu en lisant, je m’interroge sur mon bonheur. C’est un peu mon voyage aussi.
En ce moment, difficile de faire le point.
Je ne peux pas écrire que je suis malheureuse.
J’ai une famille, un compagnon et 3 adorables garçons en pleine forme.
J’ai de nombreux ami-e-s très présents près de moi.
J’ai une jolie maison et un jardin.
J’ai un travail.
Je vis dans un pays où l’on a beaucoup de chance de vivre.
Je fais de la peinture et j’aime ça.

Mais en ce moment quand on me demande comment je vais, je n’arrive pas à répondre bien car à toutes les phrases écrites plus haut, il y a un mais….
J’en ai presque honte de ce mais.

La leçon n°5 du livre c’est : Le bonheur parfois c’est de ne pas comprendre.
et moi en ce moment ne pas comprendre me rend infiniment triste.

La leçon n°15 : Le bonheur c’est de se sentir complétement vivant et là moi je ne me sens pas vivre, je sais c’est moche et ça ne correspond pas à tout ce que je fais mais je vous parle de ressenti.

Le bonheur dépend il des circonstances ou d’une manière de voir les choses ?
Ce livre fait réfléchir sur le sens de la vie, l’intensité de ses actes…
Je vais aller voir une psy, je lui dirai tous les « mais » qui me poursuivent, je suis inquiète d’aller la voir alors que je sais qu’il le faut…

En fait ce livre me dit que mon bonheur est là et du coup je me sens incapable d’en profiter !
Paradoxe.
Symbiose.